Œnologue réputé grâce à sa science aromatique d’harmonies moléculaires qui l’amène à collaborer avec des chercheurs, chefs et entreprises de partout sur la planète, François Chartier annonce « le projet d’une vie » : un partenariat inédit avec le Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ) afin de créer une expérience olfactive unique autour de L’hommage à Rosa Luxemburg, fresque monumentale de Riopelle.
C’est au sommet du futur Espace Riopelle, dont l’ouverture est prévue à la fin de 2025 ou au début de 2026, que le public pourra vivre cette expérience en admirant l’œuvre magistrale acquise en 1996 par le MNBAQ, la plus imposante jamais réalisée par Riopelle, totalisant plus de 40 mètres de longueur. Le peintre québécois avait entamé la réalisation de ce que beaucoup considèrent comme son œuvre-testament en 1992, à son atelier de l’Île-aux-Oies, après avoir appris la mort de son ancienne compagne Joan Mitchell.
Le partenariat, annoncé ce lundi entre le MNBAQ et François Chartier, n’a rien de fortuit. Le sommelier de renommée internationale, qui vit depuis plusieurs années à Barcelone, a bien connu le peintre dans les années 1990, alors qu’il travaillait à la Clef des Champs, puis au Bistro à Champlain, dans les Laurentides, où Riopelle avait ses habitudes.
Je rêvais secrètement depuis toujours de faire quelque chose avec cette œuvre incroyable, qui m’habite.
François Chartier
« J’ai connu Riopelle à l’époque où il peignait la Rosa, je l’ai vue exposée à Mont-Rolland en 1993 dans le sous-sol de l’église, à huis clos », se remémore l’homme, de passage dans la métropole pour une visite éclair.
Il y a environ un an, François Chartier a réalisé que les astres convergeaient, notamment avec le 100e anniversaire de naissance du peintre et les 75 ans de Refus global qui seront célébrés cette année. Il a joint Huguette Vachon, dernière compagne du peintre, qui l’a mis en contact avec la Fondation Riopelle et, ultimement, le MNBAQ.
Un peu comme il l’avait fait en 2018 avec Sentir pour voir Picasso, partenariat avec le musée Picasso à Barcelone pour l’exposition Dans la cuisine de Picasso, Chartier mettra sa science aromatique au service de l’art, afin de proposer une expérience olfactive inédite aux visiteurs de l’Espace Riopelle, un pavillon consacré à Jean Paul Riopelle où les visiteurs pourront admirer la plus grande collection publique d’œuvres du peintre, et dont les travaux préparatoires viennent de commencer.
Ressentir Riopelle
François Chartier ignore encore quelle forme exactement prendra cette expérience pour le moins unique, et qui sera intégrée de façon permanente à l’Espace Riopelle. Récemment, il a pu se rendre à l’atelier du peintre et recueillir des échantillons de peinture, aérosols, huiles, feutres… Il compte analyser le tout avec une technique sophistiquée appelée spectrométrie de masse, grâce à laquelle il pourra identifier leurs molécules aromatiques dominantes.
« À partir cela, je peux trouver des ingrédients dans la nature qui ont les mêmes molécules. Mais est-ce qu’on va nécessairement utiliser cela, je ne sais pas ! », lance-t-il, attablé pour un repas rapide au restaurant L’Express.
Rosa Luxemburg a tellement à dire et il y a tellement de façons d’exprimer et interpréter l’œuvre qu’en ce moment, on met tout sur la table. Ensuite, sky is the limit !
François Chartier
Les arômes, remarque Chartier, ont ce pouvoir, même à notre insu, de nous faire décrocher de la réalité, de transporter du visible vers l’invisible. En offrant cette expérience olfactive, le créateur d’harmonies moléculaires souhaite faire résonner, ressentir cette œuvre d’une façon nouvelle chez les visiteurs.
Cette annonce marque aussi pour Chartier un retour au Québec, du moins en partie, alors qu’il prévoit ouvrir au printemps à Québec une antenne de son Chartier World LAB, fondé à Barcelone il y a deux ans, où il fait partager sa science aromatique à différents clients et partenaires.
Source: François Chartier | Une expérience olfactive autour de la Rosa de Riopelle | La Presse